Un communiqué publié par Unicef Belgique révèle que l’antenne belge du Fonds des Nations unies pour l’enfance a réussi à récolter plus de 28 millions d’euros l’année dernière en soutien aux enfants dans le monde entier. Ce résultat a été rendu possible grâce au soutien de près de 95 000 marraines et parrains.
Sur cette somme, plus de 19 millions ont été alloués à des programmes d’aide d’urgence et de développement destinés aux enfants vulnérables à travers le monde. Unicef rappelle que des régions telles que la Syrie, la Turquie, le Maroc, la République démocratique du Congo, Haïti, le Yémen, le Soudan, l’Afghanistan, l’Ukraine et Gaza ont été touchées par des catastrophes naturelles ou des conflits prolongés, voire les deux.
Une aide immédiate aux familles
Ces fonds permettent d’apporter une aide immédiate aux familles vivant dans ces zones. Unicef insiste : « Les bases d’un développement structurel sont posées afin d’améliorer les perspectives des adultes de demain ». Les enfants bénéficient ainsi d’un accès à des soins de santé, à de l’eau potable, à des repas nutritifs et à une éducation de qualité.
Promotion et protection des droits de l’enfant
En plus de son action à l’échelle mondiale, Unicef Belgique se concentre sur la promotion et la protection des droits de l’enfant, ainsi que sur les problèmes urgents en Belgique. En 2023, l’organisation a mis l’accent sur la pauvreté infantile, le bien-être mental et les enjeux climatiques.
« Prendre le parti des enfants », un mémorandum en vue des élections
En prévision des élections à venir, Unicef Belgique a lancé un mémorandum (déjà partagé sur Born in Brussels) et une campagne de sensibilisation auprès des responsables politiques et du grand public, intitulée « Prendre le parti des enfants ». Ce document met en lumière le fait qu’environ un demi-million d’enfants en Belgique risquent de tomber dans la pauvreté, tandis que de nombreux autres sont confrontés à des problèmes de santé mentale et à des inégalités dans l’accès aux services de garde d’enfants et à l’éducation, en plus des risques environnementaux.
Une étape importante vers la reconnaissance du deuil en cas de fausse couche ou de perte de grossesse a été franchie en Belgique ce lundi 6 mai. Les fonctionnaires du fédéral auront désormais droit à deux jours de congé rémunéré en cas de fausse couche, selon une annonce de la ministre de la Fonction publique, Petra De Sutter. « En prévoyant deux jours de congé légaux, j’espère briser ce tabou et rendre le sujet abordable », a-t-elle déclaré.
Cette mesure vise à combler une lacune importante dans le soutien offert aux personnes confrontées à cette épreuve. Petra De Sutter, qui est également gynécologue, souligne que jusqu’à un quart des grossesses se terminent prématurément, mais que le sujet reste souvent tabou, exacerbant la solitude des personnes concernées. Cette avancée témoigne d’une prise de conscience croissante de la nécessité de reconnaître et de soutenir pleinement les personnes confrontées à la perte d’une grossesse, tant sur le plan physique qu’émotionnel. Mais ce n’est qu’un début et d’autres avancées doivent encore se concrétiser pour que toutes toutes les femmes soient sur un même pied d’égalité.
Situation des femmes du secteur privé : un vide légal persistant
Cependant, cette avancée survient dans un contexte où persiste un vide juridique pour les travailleuses du secteur privé en Belgique. Elles doivent donc faire face à des défis supplémentaires lorsqu’elles traversent cette épreuve, sans bénéficier du même soutien légal que leurs homologues du secteur public. Cette disparité souligne l’importance d’une action législative pour combler ce manque et garantir un traitement équitable à toutes les travailleuses confrontées à une fausse couche. Fin 2022, la députée Vanessa Matz (Les Engagés) a déposé une proposition de loi pour pallier ce manque. Pour elle, il suffirait d’apporter un ajout dans l’arrêté royal du 28 août 1963, qui régit ce qu’on appelle le «petit chômage» (permettant au travailleur de conserver sa rémunération normale notamment lorsque certains événements familiaux surviennent).
Prendre exemple sur les mesures mondiales en la matière
Dans d’autres pays, des mesures similaires sont prises pour reconnaître et soutenir les personnes confrontées à une fausse couche. Par exemple, la Nouvelle-Zélande a récemment adopté une loi permettant aux femmes et à leur partenaire de prendre trois jours de congés payés pour faire leur deuil. D’autres pays comme l’Inde, l’Indonésie, ou encore les Philippines ont également mis en place des politiques similaires, octroyant des congés payés en cas de fausse couche. En Ontario, au Canada, une femme qui subit une fausse couche peut bénéficier de 17 semaines de congé sans solde, tandis qu’en Australie, un congé sans solde est possible en cas de perte du bébé après au moins 12 semaines de grossesse. Ces exemples montrent une tendance vers une sensibilisation mondiale à la nécessité de reconnaître et de soutenir les personnes confrontées à une fausse couche. En Belgique, cependant, aucune mesure n’est encore en place pour les travailleuses du secteur privé qui traversent cette épreuve, mettant en lumière un besoin urgent de réforme législative pour combler ce vide et offrir un soutien adéquat à toutes les personnes concernées.
Droits et allocations en cas de fausse couche : ce qui est prévu à Bruxelles
Dans la région de Bruxelles, si vous êtes confrontée à une fausse couche ou si votre enfant est mort-né, vous avez droit à l’allocation de naissance dans certaines conditions. Vous pouvez bénéficier de cette allocation si votre enfant est mort-né ou si vous avez fait une fausse couche et que la grossesse a duré au moins 180 jours. Cependant, si la fausse couche survient avant le 180e jour de grossesse, vous ne serez pas éligible à l’allocation de naissance. La durée de la grossesse est calculée à partir de la conception. Pour obtenir cette allocation, vous devez envoyer l’acte d’enfant sans vie rédigé par la commune à votre caisse d’allocations familiales. Il est important de noter que l’allocation de naissance est toujours versée à la mère de l’enfant.
Au sein d’un précédent article publié sur Born in Brussels, nous vous partagions le témoignage Samantha (qui s’est exprimée dans l’émission « Ça commence aujourd’hui » de France 2) . Elle y partage son expérience déchirante de la perte de son bébé à la 38e semaine de grossesse. Elle décrit le choc et la confusion qui ont suivi l’annonce de la mort de son bébé par le médecin, ainsi que les sentiments de désespoir et de déni qui ont suivi. Malgré cette tragédie, Samantha et son partenaire ont trouvé la force de se soutenir mutuellement et ont ensuite accueilli une nouvelle grossesse avec espoir. Le témoignage de Samantha met en lumière la complexité et la douleur du deuil périnatal, ainsi que l’importance cruciale du soutien familial et de l’accompagnement professionnel pour aider les parents à traverser cette épreuve dévastatrice.
Avec l’inauguration d’Olista, le 22 avril dernier, une étape importante a été franchie dans la lutte contre les violences intrafamiliales (VIF) en Région bruxelloise. Ce premier centre d’aide aux victimes de VIF est révolutionnaire de par sa mission de soutien optimal aux personnes concernées, ainsi que de par la coordination des efforts de tous les acteurs et actrices impliqués dans cette lutte. Une initiative de safe.brussels, rendue possible grâce au soutien de la Secrétaire d’État en charge de l’Égalité des chances et de son administration equal.brussels.
Visuel créé par safe.brussels pour le projet Olista
{Communiqué de presse de safe.brussels}
« Olista incarne un véritable tour de force de collaboration et d’engagement. Depuis ses débuts, nous avons travaillé sans relâche pour réunir des partenaires de différentes disciplines et communautés, surmontant les barrières linguistiques et conceptuelles pour offrir un soutien complet aux victimes de violences intrafamiliales. Olista est bien plus qu’un centre : c’est un symbole de notre capacité à unir nos forces pour un avenir plus safe », s’est exprimée Sophie Lavaux, directrice général de safe.brussels
13 signalements par jour en Région bruxelloise
Avec 4.848 plaintes recensées en 2022 et deux féminicides identifiés, ces chiffres alarmants des VIF en Région bruxelloise soulignent la nécessité d’une action concertée.
Olista est conçu pour apporter un soutien à 360° en matière d’aide aux victimes de VIF. En fournissant des protocoles de travail aux professionnels, le centre garantit un accès simplifié à une gamme complète de services et d’expertises nécessaires pour aider les victimes à sortir de leur situation.
Les objectifs du nouveau centre
Le centre vise à fournir aux victimes de VIF tout le soutien nécessaire pour reconstruire leur vie. Et ce, en favorisant une approche transversale et efficace grâce notamment à la mise en place de protocole de travail entre les partenaires. Olista s’engage à coordonner les efforts de ses partenaires pour assurer une prise en charge complète et adaptée à chaque situation. Les partenaires impliqués dans cette initiative reflètent la diversité et la complémentarité des services nécessaires pour lutter efficacement (holistiquement) contre les VIF.
De safe.brussels aux différentes associations, en passant par les services sociaux, médicaux, juridiques et judiciaires, chaque partenaire apporte une expertise précieuse à la table.
La lutte contre violences intrafamilales : une priorité politique
L’inauguration d’Olista s’inscrit également dans le cadre plus large de l’engagement politique de la Région bruxelloise envers la sécurité et le bien-être de ses citoyens et citoyennes. Cette initiative concrétise la Déclaration de Politique Régionale 2019-2024 du Gouvernement bruxellois, qui place la lutte contre les violences envers les femmes au premier plan de ses priorités. Selon la secrétaire d’Etat Nawal Ben Hamou, « ce centre attendu de longue date vient compléter une série d’actions fortes qui sont déjà menées en région bruxelloise, comme les cellules EVA, les formations de la police ou encore le tout premier site web régional stop-violence.brussels. J’ai voulu unir nos forces à Bruxelles, seule façon de parvenir à diminuer et même éradiquer ces violences qui proviennent majoritairement des hommes et qui touchent majoritairement les femmes. »
Olista est plus qu’un centre : c’est un espoir concret pour les victimes et une solidarité forte pour les partenaires engagés, démontrant que lorsque nous unissons nos forces, nous pouvons surmonter les inégalités de notre société.
La santé des Bruxellois.es s’est améliorée ces dernières années, avec une augmentation de l’espérance de vie. La vaccination est en légère hausse et l’impact de l’environnement est préoccupant. Ce sont-là quelques enseignements du Tableau de bord de la santé en Région bruxelloise, publié tous les 5 ans par l’Observatoire de la Santé et du Social, service d’étude de Vivalis (dont Born in Brussels fait partie).
La santé de la population bruxelloise s’est améliorée au fil des années, comme le montrent plusieurs indicateurs du Tableau de bord de la santé de la Région bruxelloise 2024. Concernant plus précisément les enfants, quelques points clés ont été abordés : le taux de natalité, la mortalité infantile, la vaccination, les taux de consultations et d’hospitalisations et l’impact de l’environnement.
Une population bruxelloise jeune
Le taux de natalité à Bruxelles, qui était le moins élevé de toute la Belgique dans les années 60 (14,4 pour 1.000 habitants), a commencé à rattraper les autres Régions vers les années 1980, pour les dépasser et devenir le plus élevé en 2010. Mais en 2020, il y a eu une redescente progressive en deçà du taux de départ (12,9 pour 1.000 habitants), alors que les deux autres Régions se situaient à 10,9 pour 1.000 habitants. Ces différences régionales restent importantes dans la mesure où les chiffres de 2023 publiés par STATBEL le 12 février 2024, montrent une baisse en Région flamande (-2,3%) et en Région wallonne (-5,0%), ainsi qu’une baisse encore plus nette en Région de Bruxelles-Capitale (-12,0%) par rapport à la période 2019-2022. Malgré tout, le taux de natalité demeure encore plus élevé en Région bruxelloise. D’où la jeunesse de sa population.
« Les inégalités en matière de santé commencent déjà avant la naissance »
Le rapport montre également que « les inégalités en matière de santé commencent déjà avant la naissance. » D’ailleurs, le risque de mortinatalité (enfant mort-né) était deux fois plus élevé pour les enfants nés dans des ménages sans revenu de travail que pour ceux nés dans des ménages à deux revenus. Le revenu d’intégration et la plupart des revenus de remplacement dont disposent ces ménages étant actuellement inférieurs au seuil de pauvreté, les ménages qui ne disposent d’aucun revenu de travail vivent souvent dans des conditions économiques précaires (mauvaise santé en général, pas de suivis corrects de grossesse, multimorbidité…). Concernant le risque de décès avant l’âge d’un an ; il a diminué pour toutes les catégories de revenu entre la période 2000-2009 et la période 2010-2019.
Il faut savoir, pour être précis dans les termes, que la mortalité foeto-infantile inclut trois composantes : la mortinatalité, la mortalité néonatale et la mortalité postnéonatale. Dans le rapport, on peut lire ceci : « La mortalité périnatale comprend la mortalité foetale et la mortalité néonatale précoce. La mortalité infantile regroupe l’ensemble des décès d’enfants nés vivants survenus avant leur premier anniversaire (décès entre 0 et 364 jours). Les différents taux de mortalité sont exprimés pour 1.000 naissances vivantes (mortalité néonatale, postnatale ou infantile) ou pour 1.000 naissances vivantes et mortinaissances (mortalité foetale, périnatale et foeto-infantile). »
La vaccination en légère hausse
La dernière enquête de couverture vaccinale des enfants de 18 à 24 mois en Région de Bruxelles-Capitale a été réalisée entre juin 2019 et mars 2020 et visait les enfants nés entre le 31 mai et le 30 novembre 2017. Selon cette enquête, 86,7% des enfants ont suivi l’intégralité du calendrier vaccinal recommandé. En comparaison avec l’enquête de couverture vaccinale menée en 2012 à Bruxelles, les couvertures vaccinales sont globalement légèrement plus élevées en 2019-2020, à l’exception du vaccin contre le rotavirus pour lequel on observe une petite diminution. Des variations des couvertures vaccinales sont observées selon certaines caractéristiques socio-démographiques des parents. Les auteurs observent une tendance à une moins bonne couverture vaccinale lorsque la mère ou le père a étudié plus longtemps. Pour certains vaccins, les auteurs observent également que les enfants issus de ménage à deux revenus professionnels, de mères actives ou fréquentant une crèche sont plus fréquemment vaccinés. Enfin, le facteur qui semble le plus discriminant par rapport à la couverture vaccinale est la fréquentation d’une consultation pour enfants de l’Office de la naissance et de l’enfance (ONE) ou de Kind en Gezin, qui est associée à une meilleure vaccination des enfants en comparaison aux enfants qui n’ont jamais été suivis dans ces consultations.
Enfance et maladie
67 % des enfants de 0 à 4 ans vont au moins 1 fois chez le généraliste en Flandre et 65 % en Wallonie (non illustré). Les Bruxellois consultent plus souvent un spécialiste (pédiatre) avec leurs enfants, se rendent plus souvent aux urgences pour des problèmes pouvant être traités par le généraliste ou reportent plus souvent des soins. Les familles monoparentales sont également les plus susceptibles de reporter des soins. Cela vaut tant à Bruxelles que dans le reste du pays. Les couples avec enfants doivent aussi plus souvent reporter des soins que les couples sans enfants.
Le taux d’hospitalisations classiques varie fortement en fonction de l’âge selon une courbe en U. Il est élevé chez les enfants de moins d’un an, diminue très fortement dès l’âge de un an et remonte progressivement à partir de 15 ans. C’est seulement à partir de 85 ans que le taux d’hospitalisation dépasse celui des enfants de moins d’un an. Concernant la durée moyenne de séjour à l’hôpital, il est plus élevée chez les enfants de moins d’un an, diminue ensuite dès l’âge d’un an, pour finalement augmenter en fonction de l’âge à partir des alentours de la catégorie d’âge des 45-49 ans.
L’impact préoccupant de l’environnement
Cette nouvelle édition du Tableau de bord met pour la première fois l’accent sur l’impact de l’environnement urbain, du travail et du logement sur la santé ; des éléments qui sont souvent primordiaux à prendre en considération pour les familles avec enfants. En matière d’environnement urbain, des changements positifs sont intervenus en termes de qualité de l’air. Les concentrations des principaux polluants, tels que les particules (PM2,5) et le dioxyde d’azote (NOx), diminuent de manière significative, de 80 % et 71 % respectivement, entre 1990 et 2020. Cependant, ces concentrations restent au-delà des normes recommandées par l’OMS. Selon des estimations, la pollution de l’air est responsable d’un peu plus de 930 décès prématurés par an à Bruxelles. Les sources de ces deux polluants sont principalement le transport routier et le chauffage des bâtiments. On constate que les personnes aux revenus les plus bas habitent dans les quartiers les plus pollués révélant une inégalité environnementale tout à fait marquante. Concernant enfin le logement : à Bruxelles, 10% de la population rencontre des problèmes sérieux d’humidité ou moisissures dans son logement, contre 5% en Flandre et en Wallonie. 22,8 % de ces personnes vivent dans des ménages en difficulté financière, contre seulement 2,7 % des personnes plus aisées. Ces problèmes de logement peuvent avoir de grandes répercussions sur la santé physique et mentale, la vie de famille, le parcours scolaire des enfants, etc. Ce qui aggrave encore les conditions de vie quotidiennes.
Pour Alain Maron, ministre bruxellois de la Santé et de l’Action sociale, il faut encore faire des efforts : « À travers toute la politique en social, en santé et en environnement, j’ai travaillé à réduire les inégalités en la matière. Mais force est de constater qu’il reste encore énormément de travail et que ce sont toutes les politiques, économiques, d’emploi, de logement, d’alimentation, d’enseignement, qui doivent prendre en compte la santé si nous voulons, ensemble, réduire les inégalités sociales de santé. »
Sous la houlette de l’écrivaine Julia Kerninon, six autrices et mères ont pris la plume pour exprimer la dure et douce expérience, l’immense complexité, le troublant paradoxe qui se cache derrière la maternité. « Être mère » est un bijou sorti en avril 2024 aux éditions l’Iconoclaste. Il vous transperce et vous emporte dans ce monde étrange et fascinant. Il dit enfin la vérité, sans concession, sans tabou. Born in Brussels l’a lu pour vous.
Crédit photo : Sofia Douieb
Pour une fois, je ne me cacherai pas derrière mon statut de journaliste et coordinatrice adjointe de Born in Brussels. Pour une fois, je m’exprimerai en tant que Sofia, mère d’un grand garçon de 8 ans. Parce que je sais aussi ce que c’est d’être mère. Ce livre exprime tout haut ce que j’ai toujours gardé tout bas. Se plaçant loin des clichés et du bien pensant, il dit enfin ce que chaque (future) mère devrait vraiment savoir à propos de la grossesse, de l’accouchement, de la découverte de la maternité, de la peur qui ne vous lâche plus…
Galerie d’œuvres d’art sur la maternité
Ce que j’ai lu dans « Être mère » a résonné au plus profond de mes entrailles. Parce que des lectures font ça parfois. Parce que c’est si rare de lire des mots qui sont l’exact prolongement de ce qu’on pense, de ce qu’on vit ou ce qu’on a vécu. Chacune des sept autrices à succès – Julia Kerninon, Claire Berest, Adeline Dieudonné, Clémentine Beauvais, Victoire de Changy, Camille Anseaume et Louise Browaeys – offre un texte poignant et incisif d’une dizaine de pages aux lecteur.rice.s ; chacune dans son propre style, son propre rythme. Julia Kerninon, la cheffe d’orchestre, ne voulait pas de témoignages, mais une « galerie d’œuvres d’art sur la maternité » ; pour ne pas avoir à choisir « entre politique et poétique ». Et c’est, selon moi, une totale réussite où l’on retrouve de l’engagement, de l’intime, de l’humour, des coups de gueule, des épanchements, des remises en question, des mises à nu… Tout cela sur cette thématique commune partagée par « la moitié de l’humanité ».
Lancement à la librairie Les yeux gourmands
Lancement du livre « Être mère », le 4/04/2024 à la librairie Les yeux gourmands, en compagnie de deux des autrices : Adeline Dieudonné et Victoire de Changy – Crédit photo : Sofia Douieb
Présente au lancement du livre « Être mère » à la librairie Les yeux gourmands (Saint-Gilles) le 4 avril dernier, je ne me doutais pas encore de ce que j’allais découvrir au sein des 155 pages du recueil, ni même d’en être bouleversée à ce point. Deux autrices belges – les autres sont Françaises – étaient présentes : Adeline Dieudonné et Victoire de Changy. Elles ont partagé avec l’assistance leur expérience respective de la maternité et l’angle choisi pour le texte repris au sein du livre. Dans le préambule de ce dernier, il est écrit ceci : « Adeline Dieudonné attaque frontalement la question de la peur qui ne nous quitte plus quand nous devenons parent, et que nous avons pourtant été incapables de deviner avant de l’être. (…) Victoire de Changy décrit sa vie avant ses enfants, ce qu’ils suspendent et ce qu’ils étendent. » Durant cette présentation, comme au sein de l’ouvrage, il n’y avait pas de tabou. Elles se sont mises à nu devant l’assistance et n’ont pas tenté d’idéaliser ou d’édulcorer la réalité. Être mère, c’est foutrement compliqué, prenant, aliénant, envahissant, déformant, mais on le referait encore et encore tant ces petites merveilles grincheuses nous font voir la vie autrement, nous apportent un amour pur et sincère, nous transcendent et nous élèvent… C’est là tout le paradoxe de la maternité : oui c’est dur et douloureux, mais c’est aussi tellement beau qu’on a envie de crier de bonheur et d’amour.
Un souffle, une phrase, aucun point
Un texte en particulier m’a autant impressionné que prit à la gorge d’émotion. Il m’a littéralement coupé le souffle et empêché de respirer. « Pas de gâteau » – c’est le titre du récit de Claire Berest – fait vingt pages (de la 67 à la 87) ; vingt pages pour aucun point et si peu de virgules. Parce qu’avoir des enfants, « ça ne cesse pas, ça ne peut plus jamais s’arrêter, nul autre sacrifice n’est comparable à cet irrémédiable adieu à la liberté, j’ai deux enfants, j’ai deux enfants, c’est le présent pur tous les jours, il n’y a pas de point, à peine de virgules, c’est une seule phrase perpétuellement commencée, une phrase-noyade ». Dans ce texte qui semble ne jamais prendre fin, l’autrice évoque le « grand tourbillon » que crée la venue d’un enfant, « cette impression d’être constamment en équilibre précaire entre le passé et le présent, artiste et animal à la fois ».
Quelques phrases marquantes
J’ai envie de partager ici quelques phrases de cette poignante lecture qu’on a peine à lâcher :
« Parfois je suis une mère sans m’en sentir une, parfois je suis une mère sans avoir l’impression d’exister encore en tant que personne. » – Julia Kerninon
« Au pire, ces manuels ont recouvert la maternité d’un voile niais, presque totalitaire, en commençant les phrases par ‘il faut’ et en nous dictant les sentiments que nous devions avoir. » – Louise Browaeys
« Faire des enfants nous transforme en créatures nues, vulnérables, nous place dans une roue de torture médiévale qu’un simple accident pourrait activer, nous labourent l’âme pour l’éternité. » – Adeline Dieudonné
« Ce qui pousse en toi n’est pas ton prolongement, ta continuité, toi en minuscule ou je ne sais quelle connerie, non, ce qui pousse en toi est le pur étranger, qui aura des qualités et des défauts que tu ne peux qu’extrêmement peu influencer ». – Claire Berest
« La maternité ne m’a pas appris de grandes choses. Les grandes choses je les ai faites, et elles sont présentement à la crèche et au collège. » – Camille Anseaume
« La réappropriation féministe de la naissance est paradoxale, complexe. Malaisante, je dirais même. Parce qu’elle vibre de toutes les contradictions qui secouent aujourd’hui les existences des femmes et qui rendent la définition même du terme féminisme maladroite, malaisante, bizarre. Parce qu’elle émerge, aussi, après tant de millénaires à se taire. » – Clémentine Beauvais
« Dans cette façon d’être à eux plutôt qu’à soi, j’ai trouvé la possibilité d’abandon. (…) Je ne situe plus celle que je suis ou fus. (…) Je cherche avec une peine que je ne soupçonnais pas les angles de vue où mes enfants ne se trouvent pas. Ce qui avant eux m’anima. Ce qui m’inspira. » – Victoire de Changy